Cet article est extrait de l’entretien audio avec Camille Marguin, co-présidente de Tous Élus et ancienne déléguée générale de Générations Cobayes, l’association qui a mis sur la place publique le débat sur les perturbateurs endocriniens.
Pour beaucoup d’associations, il est difficile de s’organiser et d’accueillir dans de bonnes conditions bénévoles ou militants. Le problème identifié par Camille est le suivant : “Les responsables d’associations n’arrivent pas à prendre le recul nécessaire pour s’organiser eux-mêmes et ainsi pouvoir intégrer de nouveaux bénévoles”. Il faut donc déjà arriver à s’organiser soi-même.
“Il y a plein d’associations qui, dans l’absolu, ont besoin de bénévoles mais qui n’arrivent pas à identifier ce qu’elles feraient faire à leurs bénévoles.”
Avec, en quelques semaines, plus de 100 bénévoles chez Tous Élus, l’expérience de Générations Cobayes (de 5 bénévoles jusqu’à 300 bénévoles actifs), Camille sait de quoi elle parle.
“Former les bénévoles à être des managers de bénévoles”
Tout est dans la culture de l’association, le choix du mode de démocratie interne et la formation.
1. Définir sa culture, choisir un mode de démocratie interne
Définir sa culture concrètement, c’est établir, pour l’organisation ou l’association, des éléments structurants et clairs pour toute l’équipe et les bénévoles.
Le plus simple, alors, est de créer des listes :
- Ce que l’on fait vs ce que l’on ne fait pas
- Ce que l’on défend vs ce que l’on combat
C’est une méthode qui permet d’être structurant et clair avec les bénévoles. Pour qu’ils puissent prendre toute la place pour diffuser votre message sans utiliser des méthodes que vous n’approuvez pas (ce que l’on fait vs ce que l’on ne fait pas) ou défendre des positions que vous ne cautionnez pas ce que l’on défend vs ce que l’on combat. De plus, ces listes se diffusent facilement, elles sont faciles à prendre en compte et claires sur ce qu’il ne faut surtout pas faire.
Vous pouvez aussi facilement faire évoluer ces listes au gré des situations rencontrées !
2. Ne pas avoir de tabou sur la professionnalisation de sa structure
“On se sert des compétences des gens. Il faut pouvoir se dire que c’est comme une PME avec 100 personnes.”
Le fait d’organiser professionnellement l’association donne une vision structurée et large du mouvement. “Je mappe ce qu’il y a dans l’écosystème et quels sont les besoins”.
Il faut qu’il y ait une vision macro de l’association pour que ça fonctionne”. En bref, on sait qui fait quoi, comment et quand.
3. Faire attention au “burn-out associatif”
“Gérer 80 personnes, c’est un boulot de dingue.” Mais ce temps d’organisation et de prise de décision est finalement largement compensé sur le long terme. “Le temps que tu prends tu le gagnes après sur l’engagement de tes bénévoles.” Ils vont plus s’engager que les autres, s’il y a un plan de route clair et défini en amont.
4.Mettre l’accent sur la formation de ses bénévoles
Pour Camille, il faut “former les bénévoles à être des managers de bénévoles”. C’est aussi le principe de l’empowerment : donner des responsabilités pour aller plus vite.
“Manager est aussi une compétence importante et très valorisable en dehors de l’association”
Avoir des bénévoles qui vont savoir quels sont leurs objectifs, combien ils ont besoin de bénévoles et comment les former, ça change tout dans l’organisation de l’association. C’est comme ça qu’on arrive à mobiliser efficacement.
5. Les petits pas ou le micro-engagement
Dernière stratégie, celle des petits pas. C’est l’engagement petit à petit.
“Par exemple, on va proposer une action courte de 4h seulement, puis il y va y en avoir 50% qui vont vouloir faire plus et les 50% qui vont décider d’arrêter”.
Ce système respecte chacun pour que le bénévolat reste du plaisir. L’engagement, c’est pour tout le monde et c’est partout, chacun de nous peut s’engager tant qu’on lui donne les moyens. “Il n’y a personne qui ne s’intéresse à rien. Tout le monde a des trucs qui l'agacent.” Il est facile de trouver un mouvement qui défend notre cause, ne serait-ce qu’en cherchant sur Google. “L'engagement ce n'est pas forcément le moteur de sa vie”, il doit être adapté à chacun mais “on peut commencer doucement par des micro-engagements.”
Cet entretien a été enregistrée en janvier 2019 avec Justine Mothe et Florent Barre.